Someday we will foresee obstacles
(3rd Side Records / V2) – sortie le 25 avril
“Someday we will foresee obstacles” dit le titre du disque. Il est pourtant un obstacle que Syd matters vient de franchir avec une agilité d’esprit réjouissante : l’épreuve dite du second album. À savoir, comment être à la hauteur lorsque votre première tentative, déboulée de nulle part, a connu un succès maousse et spontané : éloge unanime de la critique, coup de coeur du public — Syd matters a remporté en 2003, le premier concours CQFD des Inrock—, plus de 15 000 albums vendus en France, une sortie à l’internationale et une série de concerts enchanteurs (de La Route du Rock au Festival des Inrocks, du mythique 12 Bars à Londres au festival By Larm en Norvège). Comment surprendre une seconde fois tout en restant fidèle à la première ?
Réponse: en faisant tout à la fois plus ample et plus intime. Par rapport à “A whisper and a sigh”, la musique de “Someday we will foresee obsctales” gagne en envergure, résultat de la découverte de la scène et la richesse du jeu de groupe. “Le premier album, je l’avais en partie enregistré seul, dans ma chambre. Le point faible, c’était la rythmique : je jouais les lignes de basses moi-même et me servais d’une boîte à rythme. Pour l’enregistrement du nouvel album, j’ai travaillé certains morceaux avec les musiciens qui ont participé à la tournée “. Et puis il y a l’expérience des concerts: “Je me suis découvert très à l’aise sur scène, ce qui pour un ultratimide comme moi est plutôt une bonne nouvelle. Surtout, j’ai compris qu’il ne fallait pas avoir peur de retourner un morceau, de prendre le risque de le perdre, j’ai appris à ne plus être dans le contrôle total”.
Plus luxuriante sa musique n’en perd pas moins son centre de gravité et elle gagne même en profondeur. Jonathan est encore jeune mais a saisi l’essentiel: “Lorsque j’avais 17 ans j’étais obsédé par l’idée d’être original. Aujourd’hui, je sais qu’être original, c’est être le plus proche possible de soi. Les musiciens que j’aime ne se rattachent à aucun genre, aucune scène. Ce sont des personnalités qui ont leur propre univers: Robert Wyatt, Kurt Cobain, Nick Drake ou aujourd’hui des gens comme Radiohead, Hermann Düne ou Joana Newsom.”
Ainsi agissent les compositions atmosphériques et denses de ce nouvel album. Par-delà la tradition folk (“Middle-Class Men“), rock (“Someday Sometimes“) et pop 60s (“To All Of You“), elles sont une éloge de l’intelligent et du simple, une ode à la lenteur et à la spontanéité. Syd matters nous plonge à travers ses chansons dans des rêves étranges et vastes, informés par la douleur du monde et la beauté des existences, marqués par la chaleur et l’inquiétude. À l’image de “I Care“, l’un des sommets de l’album, comptine mélancolique et voluptueuse, enregistré en duo avec l’un des héros internationaux de Syd : Euro Childs, chanteur du groupe Gorky’s Zygotic Mynci. “C’est sans doute le plus beau moment de ma courte carrière. Là j’ai rencontré quelqu’un qui malgré les aléas de carrière, ne pourra jamais faire autre chose que de la musique.”
Et ce faisant, Syd a trouvé la clé de l’innocence continuelle : celle qui, apprenant sans cesse, se réinvente à chaque étape.
Philippe Nassif
“Someday we will foresee obstacles“ a été enregistré et mixé par Yann Arnaud (Air, Sébastien Schuller, Cocosuma). La pochette est à nouveau l’œuvre de Jean-Michel Tixier.
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